De la Relation corps-esprit en yoga

Le yoga est devenu populaire et s’est beaucoup développé en occident surtout depuis une quinzaine d’années. Que vous viviez en ville ou à la campagne, vous trouverez certainement un cours de yoga proche de chez vous. A notre époque, il y en a pour tous les goûts, du plus doux au plus dynamique. Il suffit d’essayer et vous trouverez le professeur qui vous conviendra le mieux. Vous lirez sur le site de votre cours préféré des phrases racoleuses qui vous invitent à revenir, comme par exemple : « Le yoga est une discipline qui relie le corps à l’esprit en associant des postures à des exercices de respiration, de concentration et de relaxation ».

En effet, le yoga parle entre autre de corps et d’esprit qu’il faudrait harmoniser par diverses pratiques. 

Mais d’où viennent ces phrases tellement surexploitées de nos jours dans les cours de yoga ?

La philosophie indienne et plus particulièrement celle du yoga se caractérise par une recherche constante de l’unité de l’être. Au départ, les sages ont fait des constatations de la souffrance psychologique de l’homme due à une totale méconnaissance de sa nature profonde et réelle. L’homme est dispersé et est sous l’emprise d’une confusion qui le déstabilise. La méthode du yoga va consister de passer de cet état de dispersion à un autre état de stabilité et de cohésion, de passer du multiple à l’unité. 

Pour expliquer tout cela, nous nous référerons à l’un des textes fondateurs du yoga, les Yoga Sūtra de Patānjali. Ce texte concis comporte quatre chapitres et 198 aphorismes ou sūtra : 

Les quatre chapitres sont :

Le Samādhi Pāda qui va poser le but de l’étude,

Le Sadhāna Pāda où seront énumérés les moyens proposés pour atteindre le but,

Le Vibhūti Pāda qui passera en revue les résultats de la pratique proposée,

Le kaïvalya Pāda aboutissement final de la démarche de ce chemin qui s’appelle sadhāna.

Le mot sūtra signifie fil, comme le fil d’un collier de perles dont chaque perle est une partie de l’enseignement dispensé.

L’état psychologique de l’homme se caractérise par cinq états : 

Le premier état s’appelle kshipta, état dans lequel l’homme est comme un singe ivre et qui en plus serait piqué par une abeille. 

Le deuxième état psychologique est appelé mudha qui se traduit par lourdeur, inertie. Une situation dans laquelle l’homme n’a pas envie d’agir, il est comme endormi.

Le troisième état s’appelle vikshipa, c’est un état qui va encore plus dans la dispersion mais cette fois-ci l’homme est conscient de cet état de distraction totale. Et cette prise de conscience va l’amener vers une recherche de solution valable. C’est à ce moment qu’on dit « Quand l’élève est prêt, le Maitre apparait »

Le quatrième état psychologique est ekagrata, c’est-à-dire un esprit qui a la ferme intention de ne poursuivre qu’un seul but. Cela implique d’avoir acquis une lucidité sans faille et un bon pouvoir de discrimination pour progresser dans la direction du yoga.

Enfin, après avoir atteint ekagrata, le dernier état est nirodha dans lequel il y a unité entre le psychisme et l’objet auquel il s’intéresse comme s’il y avait fusion entre l’objet et le sujet. Le yogi a atteint le samādhi. Celui-ci est un état de concentration si profonde sur l’objet que la notion même de l’identité de l’observateur s’efface et seul l’objet existe. (l’égo a disparu).

Dans le premier chapitre, le deuxième sūtra nous dit « yogha citta vritti nirodhah » que l’on traduit par « le yoga c’est l’arrêt de l’activité du mental » Si cela est réalisé, alors dit l’aphorisme suivant, l’ātman ou l’âme universelle qui se trouve en chacun des êtres humains va se rattacher à l’âme du monde, le bhraman. Mais pour atteindre ce niveau de perfection, il y a des étapes à franchir qui sont celles des huit membres des yoga sūtra de patañjali. Dans la newsletter de janvier dont le sujet était le contentement, vous trouverez ces huit étapes.

Les huit étapes sont :

I ) les yama (qui comporte 5 restrictions) : 

      ahimsā : ne pas nuire, 

      satya ne pas mentir,

      asteya ne pas voler, 

      bramacharya la continence,

      aparigraha ne pas être possessif,

II ) les niyama (qui comporte 5 observances) :

       Çauca la purification,

       Samtosha le contentement,

       Tapas l’effort sur soi,

        Svādhyāya létude

        Ichvara-pranidhāna la consécration à dieu

III ) āsana (les postures),

IV )  prānāyāma (la discipline du souffle),

V )    pratyāhāra (le retrait des sens),

VI )  dhāranā (la concentration), 

VII)  dhyāna (la méditation),

VIII) samādhi (la libération). 

A la troisième étape « āsana » se trouvent justement le corps et la pratique purement corporelle qui implique à la fois rigueur, tonicité et aisance en même temps. 

Ainsi nous dit patañjali, après avoir pris conscience de nos états psychologiques et après avoir parcouru et travaillé sur les deux premières étapes (Les yama et les niyama) on en arrive au corps. Le chemin est long mais indispensable pour passer aux étapes suivantes.

Quant à l’esprit, le mot vient d’une racine latine « spir-  » qui signifie le « souffle  » et que l’on trouve dans « spirare » qui signifie « souffler » racine à laquelle on a ajouté le suffixe « -tus » servant à former des noms ; on obtient en latin « spiritus » qui signifie « le souffle ». L’esprit est donc souffle. Il y a là présence vibratoire qui anime et fait vivre les êtres humains et tout êtres vivants.  « Spiritus » a aussi surtout donné les mots inspirer (lat. inspirare) et expirer (lat. expirare). Dans le langage philosophique contemporain « Esprit » peut être opposé à différentes notions comme la matière, la chair et le corps. Or justement en yoga et contrairement à l’occident, les points de vue s’additionnent et ne se divisent pas. Ainsi donc le souffle et l’esprit sont liés.

Si on poursuit le cheminement proposé par Patañjali, l’étape qui suit « āsana » les postures, c’est « prānāyāma » le travail sur le souffle. 

Il n’y a pas de vie de l’esprit qui ne s’appuie sur le corps. Le corps sera un instrument privilégié qui s’engage dans la voie de redécouverte de l’esprit. Les deux sont donc intiment liés.

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